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mardi 3 mai 2016

Les conférences du Marais: Prosper de BARANTE, un diplomate du temps de TALLEYRAND.

Dimanche 1er mai, "les conférences du Marais" ont brillamment repris dans le grand salon du château avec l'exposé de Richard Flahaut, membre de l'Association des Amis de Talleyrand, sur Prosper de BARANTE, un diplomate du temps de Talleyrand, qui fut aussi un familier du château du Marais.

Une brillante carrière.

Prosper de Barante est né à Riom, en Auvergne en 1782, et passera son enfance au château familial de Barante, à Dorat, près de Thiers . Sa famille est de petite noblesse, son père est avocat, et sera préfet de Carcassonne, puis de Genève sous Napoléon.


Le château de Barante.

A l'issue de ses études, Prosper accède à Polytechnique en 1798. Il y passera deux ans. Il s'y ennuie. Et grâce à son amitié avec un condisciple, le fils de Chaptal, il est nommé au ministère de l'Intérieur. C'est là qu'il fait une rencontre capitale, celle de Talleyrand, dont il devient l'ami, comme en atteste la correspondance assez fournie qu'ils échangent. En 1806, à 24 ans, Prosper de Barante est nommé conseiller d'Etat. Il sera chargé, sur la recommandation de Talleyrand, d'une mission délicate en Espagne, à la suite de laquelle il sera reçu à Saint-Cloud par l'Empereur qui le félicitera. Il devient bientôt le bras droit de Daru, administrateur de la Grande armée, chargé de l'organisation des campagnes militaires. Il s'acquitte de diverses missions à Dantzig, à Berlin (il est chargé de loger la famille impériale), et à Varsovie.


                                             Prosper de  BARANTE, par Ary Shaeffer.

Ses qualités d'administrateur lui valent ensuite d'être nommé sous-préfet de Bressuire, puis préfet de La Roche sur Yon. A cette époque, c'est encore lui qui organise le mariage de l'Empereur avec Marie-Louise d'Autriche. En 1813, il devient préfet de Nantes.
Puis , c'est la Restauration, où à l'instar de Talleyrand il trouve sa place. Il se fait élire député de Nantes; il est du parti des libéraux avec Molé, Guizot, Royer-Collard, Pasquier...Mais un an après la chambre est dissoute, et une nouvelle règle électorale (il faut avoir 40 ans pour être élu) l'empêche de se représenter (il en a 34).
Grâce à Talleyrand, il devient alors directeur des contributions à Paris: il gère le paiement de la dette imposée à la France par ses ennemis.
Par la suite, il sera nommé Pair de France et sera actif à la chambre.
Sous Charles X , il se retire en Auvergne, où il écrit plusieurs ouvrages, notamment l'Histoire des Ducs de Bourgogne.
Ce qui lui vaudra en 1828 d'entrer à l'Académie française.
Avec l'arrivée de Louis-Philippe au pouvoir, Talleyrand est de nouveau en selle. Barante est nommé ambassadeur à Turin auprès du roi Carlos Felice, de la maison de Savoie, et gère plusieurs affaires délicates. En 1834, il devient ambassadeur à Saint-Petersbourg. Son épouse y ouvre un Salon, le plus élégant de la ville. C'est elle aussi qui fondera ND de SION. Prosper s'occupe alors du mariage du duc d'Orléans avec Hélène de Mecklembourg.


Prosper de BARANTE âgé.

Cadeau du tsar: il sera nommé membre de l'académie des sciences de Russie.
A la mort de Talleyrand en 1838, c'est lui qui rédigera son panégyrique.
A partir de 1841, il se retire dans son château de Barante, qu'il fera reconstruire après un incendie.
Il s'y éteint en 1866.
Prosper de Barante est honoré dans sa région. Il a même sa statue à Clermont-Ferrand.

L'ami des plus grands.

En dehors de Talleyrand, à qui il doit une bonne partie de sa carrière, Barante sera l'ami des plus grandes personnalités de l'époque. Il était reconnu comme un homme aimable, et était visiblement très doué pour créer des liens affectifs. A Genève, où son père était préfet, il a fait la connaissance de Mme de Staël et de Benjamin Constant avec lesquels se créent des liens profonds, et une correspondance nourrie existera. "Votre présence m'est salutaire", lui écrira ce dernier peu avant sa mort en 1830. Il semble qu'à 22 ans , il ait eu une liaison avec Mme de Staël, comme en attestent certaines lettres.


                                                                  Madame de Staël

Vers 1809, il réécrira les mémoires de Mme de La Roche Jacquelein. Cette famille faisait partie des meneurs des Vendéens.
En 1815, comme nous l'avons vu, il fréquentera les leaders du parti libéral, comme le comte Molé, futur premier ministre de Louis-Philippe, ou Guizot.
Il devient très ami avec Chateaubriand à son retour en France, et connaîtra bientôt Mme Récamier dont il sera très proche, ce qui déplaira beaucoup à Mme de Staël. " L'une rugit et l'autre soupire", écrira la mère de Barante.
Dans les années 1815-1820, il sera proche de la duchesse de Dino, nièce par alliance de Talleyrand, et entretiendra avec elle une correspondance.

Un familier du château du Marais, au temps de Mme de la Briche.

Lors d'un voyage à Paris, il fait la connaissance de Césarine d'Houdetot, chez sa grand-mère (ancienne protectrice de JJ Rousseau), à Sannois. C'était une des 7 enfants d'un ancien gouverneur de l'île Maurice, détroussé par des pirates lors du voyage de retour de la famille en France et ruiné. La famille se réfugia chez la grand-mère de Sannois, tante de Mme de La Briche. Celle-ci s'était prise d'affection pour la petite Césarine et s'était chargée de l'élever, comme sa fille Caroline, et de prendre en mains son éducation (très religieuse d'ailleurs). Et la jeune fille passait tous ses étés au château du Marais. Prosper et Césarine se marient en 1811. Mme de la Briche se charge de la dot de Césarine, et comme le ménage n'a pas beaucoup de moyens, elle les accueille dans son hôtel particulier de Paris (l'hôtel Saint Florentin, aujourd'hui disparu). Elle fait aussi construire une "petite maison blanche" dans le parc du château du Marais, où le couple pourra séjourner.

                                                          
                                                Mme de la Briche, la châtelaine du Marais.


Césarine de Barante, née d'Houdetot.

Après 1840, quand le château de Barante est détruit par un incendie, et en attendant la fin de sa reconstruction, Prosper et sa famille reviendront loger un temps dans la "petite maison blanche" du Marais. Mme de la Briche a alors 80 ans, et d'après le témoignage de la duchesse de Dino, venue la voir, elle était "tombée en enfance". Elle mourra en 1844 dans les bras de Césarine de Barante.
C'est Caroline, qui a épousé entre temps le comte Molé, futur premier ministre de Louis-Philippe, qui héritera avec son mari du château du Marais.


                                                    Dans le grand salon du château.

Prosper de Barante n'est pas un nom connu du grand public. La conférence nous a révélé qu'il méritait de l'être.
L'exposé détaillé, émaillé de citations précises et d'anecdotes diverses, de Richard Flahaut, a aussi le mérite  d'avoir fait de nouveau surgir du passé, sous la coupole du grand salon, toute une époque, tout un monde disparu.
C'est tout le charme des "conférences du Marais"!

JM Sattonnay.

                                 
                                  Le château du Marais: perspective de la pièce d'eau. 1/5/16.

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