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lundi 19 octobre 2015

Le comte Louis d'AFFRY, l'homme qui a failli être roi de Suisse sous Napoléon.

Pour la dernière "conférence du Marais" de la saison 2015, Monique von WISTINGHAUSEN a évoqué  la figure d'un de ses ancêtres, le comte Louis d'AFFRY ( 1743-1810) dans le grand salon du château, c'est à dire dans le lieu même  que fréquentait, de son vivant, cet habitué du Marais au temps où Mme de La Briche y tenait salon l'été. Ce personnage, fils d'un colonel des gardes suisses de Louis XV puis Louis XVI, eut sur le tard, à 60 ans, son heure de gloire en devenant le premier président de la Suisse sous Napoléon, après avoir failli être nommé "roi de Suisse" par l'Empereur !


Monique von WISTINGHAUSEN

Une enfance et une adolescence privilégiées dans un milieu ouvert aux idées nouvelles.

Après une enfance passée en Suisse dans le château familial, le jeune Louis connaît une adolescence parisienne. En effet son père, c'est une tradition chez les D'Affry, entre au service de Louis XV comme colonel de ses gardes suisses. Louis fera ses études au prestigieux collège Louis le Grand. Il fréquentera les Salons parisiens ,comme celui de Mme Geoffrin, qui reçoit des philosophes; il rencontrera par exemple D'Alembert. Les d'Affry appartiennent en effet à une aristocratie libérale ouverte aux idées nouvelles. Le père de Louis était d'ailleurs franc-maçon. Plus tard, il suivra celui-ci à La Haye, où il est nommé ambassadeur par Louis XV, avec une importante mission diplomatique dont il s'acquitte avec succès. A son retour, D'Affry père est comblé d'honneurs par le Roi.
Louis, bientôt, prend épouse, et mène une vie mondaine à Paris.

                                                             
                                                                Le château d'AFFRY.

Louis d'Affry et Mme de La Briche.

C'est dans un salon parisien que Louis fait la connaissance d'Adélaïde de La Briche, une femme appréciée de tous dont le mari est beaucoup plus âgé qu'elle. Il cherchera vite à la revoir. En 1785, Mme de La Briche part en voyage en Suisse avec son époux, qui tombe malade et meurt brusquement. Louis d'Affry alors accourt, la soutient, la console. Il l'accueille bientôt chez sa sœur, puis dans son propre château. Mais le cœur de Mme de La Briche est pris ailleurs. Louis doit se


                                                   Louis d'AFFRY et Mme de la BRICHE.

contenter d'un rôle de confident, et ô cruauté, de conseiller, car Adélaïde le consulte sur la conduite à tenir avec ceux dont elle est éprise. Le dernier en date, le marquis de Bonnay, se révéle avoir d'autres attaches, et vient le moment où Adélaïde regarde enfin Louis avec les yeux de l'amour. "Je vous aimais déjà mais j'étais seul mon confident" lui révélera-t-il...C'est bien sûr à cette époque qu'il fréquente, l'été, le château du Marais que Mme de La Briche gère seule à présent.

Louis d'AFFRY, premier président de la Suisse sous Napoléon.

Louis habite alors l'hôtel d'Affry, place Vendôme. Nous sommes en 1789. Son père, alors âgé de 80 ans, a repris sa place de régent des gardes suisses, qui seront les derniers à protéger Louis XVI. La famille est dans une position délicate, entre la fidélité au Roi et les idées libérales. Finalement son père se retire en Suisse dans son château de Saint Barthélémy, et meurt en 1793. Louis hérite de ses biens et se retire lui aussi dans son pays natal, au manoir de Presles près de Morat.


Fin 1797, alors qu'il est âgé de 60 ans, le destin vient frapper à sa porte. Bonaparte était de passage dans la région: il fait sa connaissance, et une estime mutuelle vraisemblablement naît entre eux.
Bientôt, Bonaparte, qui veut donner une nouvelle constitution à la Suisse , qu'il voit comme un pays tampon entre la France et l'Autriche, le fait revenir à Paris et lui donne  un rôle de médiateur dans cette optique. En février 1803,Bonaparte remet officiellement l'"acte de médiation" à Louis d'Affry. Le projet prévoit notamment une présidence tournante d'un an, canton par canton. Et c'est lui, pour son canton de Fribourg, qui sera le premier président de la Suisse nouvelle. Sa maison devient la


1807: président de la Suisse.
La perruque et le jabot datent encore de l'Ancien régime!...

résidence officielle de la présidence. La tâche est  immense, d'autant que  les critiques ne manquent pas. Il est traité de "valet de Napoléon". Il faut se faire accepter. Il compte sur le temps pour enraciner les nouvelles institutions. "Le temps est la pierre de touche de toutes les institutions humaines", déclare - t-il dans un discours à la diète.
" Napoléon lui aurait proposé de devenir roi de Suisse" nous confie notre conférencière, "mais il aurait refusé par esprit démocratique".
Il continuera à avoir un rôle important par la suite, comme conseiller des présidents ultérieurs. Et en cas de problème, c'est lui qu'on envoie à Paris.
Il assistera aux cérémonies du couronnement de Napoléon.
Il meurt brusquement le 26 juin 1810.


Un personnage à la charnière de deux époques.

Cet homme bienveillant, d'une grande dignité et simplicité, est arrivé tardivement, à 60 ans, dans la lumière, par suite d'un hasard. Mais il a pu alors révéler ses grandes qualités d'homme d'état et de négociateur, a conclu Monique von WISTINGHAUSEN.
Un personnage à la charnière de deux époques, l'ancien régime et les temps nouveaux..
Cette évocation a une fois de plus a fait surgir du passé, dans le grand salon, une figure d'autrefois et nous l 'a rendue plus familière.
JM Sattonnay.

Un auditoire intéressé, parfois jeune. Ainsi ce garçon de Dourdan ,Guillaume, âgé de 13 ans, passionné d'histoire (2e en partant de la gauche),le plus jeune adhérent de l'Association des Amis de Talleyrand! La relève arrive!

                                                              D'autres DOCUMENTS:


La rencontre fortuite entre Louis d'Affry et Bonaparte (1797).


19 février 1803 : Bonaparte remet l'acte de médiation à Louis d'Affry.


Un dernier portrait, vraisemblablement posthume, de Louis d'Affry.


Un petit coup d'œil du côté du parc du château pour terminer...

                                  *A voir aussi, d'autres "conférences du Marais" :

- " L'Impératrice Eugénie, ses dames d'honneur et ses Dames du palais" par
Georges LEFAIVRE.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2015/09/chateau-du-marais-le-hurepoix-et-le.html

- " Talleyrand et Mme de Flahaut" par Richard FLAHAUT.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2015/06/les-conferences-du-marais-talleyrand-et.html

-  "Louis de Talleyrand-Périgord, acteur et témoin de la Grande Guerre" par Eric MENSION-RIGAU, historien.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2014/09/les-conferences-du-marais-un-talleyrand.html

- Quand TALLEYRAND accueillait les Princes d'Espagne déchus à Valençay par Marc du Pouget , directeur des archives départementales et du patrimoine historique de l'Indre.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2014/08/les-conferences-du-marais-quand.html

- Château du Marais: trois siècles de jardinage pour construire un paysage par Régis MARTIN, architecte en chef des Monuments historiques.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2014/06/chateau-du-marais-3-siecles-de.html

- Conférences sur la Courlande et la Lettonie par Mme Sanita - Pavluta - Deslandes , ambassadrice de Lettonie en France,  Françoise Aubret-Ehnert , Yves Plasseraud, Laurent de Commines.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2014/05/lambassadrice-de-lettonie-au-chateau-du.html

- Une communauté protestante méconnue en Hurepoix au XVIIe siècle par Dominique CANTRYN.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2014/04/nouveau-cycle-de-conferences-au-chateau.html

Edmond de TALLEYRAND- PERIGORD , le HUSSARD MECONNU par Georges LEFAIVRE.
http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2013/06/edmond-de-talleyrand-perigord-le.html

- Les destins croisés de deux femmes hors du commun, Natalie de Noailles et Adélaïde de La Briche par Marie-Claude Jardin.
 http://jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/2013/05/les-conferences-du-marais-les-destins.html

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