correspondant agoravox

vendredi 18 février 2011

« Aider ceux qui sont nés du mauvais côté de la Terre »: le projet d'aide au développement de Marie-Suzanne pour le Congo.


Marie-Suzanne avec des élèves d'un  lycée de KISANTU.

   Marie-Suzanne Beauregard, professeur de Lettres à la retraite , a décidé de consacrer désormais sa vie à l'Afrique, plus précisément aux Congolais. « Certains sont nés du bon côté de la Terre, d'autres du mauvais côté subissent leur vie. C'est une question de solidarité », explique-t-elle.  Son engagement est aussi chrétien: issue d'une famille athée, elle découvre la spiritualité  et demande le baptême à 24 ans , puis fait des études de théologie à l’Institut Catholique de Paris. C'est donc aussi une façon de vivre sa foi.

Pourquoi le Congo?

Son intérêt pour le sort des Africains vient de loin: enseignante en lycée technique notamment, elle s'intéresse déjà aux élèves d'Afrique du Nord et d'Afrique Noire qu'elle côtoie, et écrit plusieurs articles sur eux dans la revue catholique Esprit et Technique. Elle fait des sessions au Comité catholique de lutte contre la faim et pour le développement et travaille dans la mouvance altermondialiste de Suzanne Georges.

Par la suite,  après deux brefs séjours au Cameroun qui se révèlent peu porteurs d’avenir pour elle, elle a l'idée d'aller au Congo: belge par sa mère, ce pays l'attire; et la rencontre d'un Jésuite qui y avait travaillé 40 ans fait le reste.
Elle est alors formée et envoyée comme Volontaire de Solidarité Internationale par la Délégation de la Coopération Catholique en lien avec le Ministère des Affaires Etrangères avec des contrats renouvelés pendant cinq ans comme animatrice pastorale dans une Aumônerie d’ Etudiants  et comme conseiller pédagogique dans l’enseignement secondaire.
 
Première expérience:

Elle part d'abord au Congo avec le projet de participer à la rédaction de livres de français dans le domaine scolaire; le premier livre achevé, elle doit renoncer à poursuivre en raison de problèmes pratiques.
Elle se consacre alors dans un lycée de Kisantu, ville de 110000 habitants située à l'extrême ouest du Congo, à l'amélioration de la didactique des professeurs de français locaux et à la modernisation de certains contenus: ils fonctionnent par exemple sur des textes de civilisation datant de 1930! Elle fait venir de France des manuels scolaires en usage dans l'hexagone.Elle enseigne aussi elle même pendant deux ans la dissertation et la littérature au lycée.
Dans le cadre d'une aumonerie , elle mène aussi un travail de sensibilisation auprès d'étudiants en médecine destiné à les faire réfléchir aux moyens de transformer la vie dans leur pays, à courte et moyen terme: « Ils sont souvent dans le rêve,  mode  privilégié pour eux de rendre la vie supportable » explique Marie-Suzanne . " Et Dieu est l’a priori fondamental de  leur réflexion, ils n'ont pas une pure approche rationnelle des choses, tout repose sur leur foi, ce qui peut pour certains être démobilisateur".
 
Un projet de maison d'accueil à Kisantu:

Marie-Suzanne prend alors conscience du fait que l'Evangile et l'enseignement du français n'aideront jamais à mettre les gens debout économiquement.

C'est alors que germe l'idée d'une « maison d'accueil »qui pourrait accueillir pour un court temps ou un temps plus long des Européens bénévoles qui viendraient apporter aux Congolais des compétences ou savoir faire pratiques: « on a ici une menuiserie à remettre en place,un garage ou une imprimerie qui périclitent...Ou encore on a des élevages de porcs, mais pas de charcuterie...etc... .Il s'agirait pour eux de s'insérer dans un projet congolais, pas de s'imposer; il faut éviter le paternalisme » Ce système existe déjà pour la santé: une communauté de soeurs travaillant pour l'hôpital fait venir et héberge des chirurgiens par exemple qui officient un temps localement,et apportent avec eux du matériel. Marie-Suzanne voudrait créer un système identique pour l'aide au développement. Ce pourraient être des préretraités ou des jeunes retraités, des actifs, des élèves de grandes Ecoles... 

« Personnellement j'ai étudié la théologie et enseigné le français, je suis donc incompétente » souligne Marie-Suzanne, « Je peux seulement être une courroie de transmission qui essaie de faire venir des gens capables d' aider aux projets ».L'idéal pour elle serait que ces bénévoles se sentent bien à Kisantu, créent des liens localement, aient envie de revenir et de voir les petits progrès réalisés.

Le but finalement est de créer des emplois dans un pays où le chômage, y compris des diplômés, est fort, où le niveau de vie est faible. Un professeur, par exemple, gagne 65 euros par mois, alors que la vie est chère! . « Certains sont obligés de vendre du papier hygiénique à la porte de l'hôpital ou d'aller aux champs pour manger! » s'indigne mon interlocutrice.


Une route dans la région de KISANTU.

Où en est le projet?

La maison déjà existe: elle comporte un séjour et cinq chambres, une buanderie, une cuisine et un cellier. Elle offrira un  confort correct. Chaque chambre sera de plus équipée d'internet. Des problèmes imprévus ont retardé les travaux, mais elle sera bientôt prête. Reste à terminer l'entrée principale et à compléter le mobilier. Au départ, c'était une ancienne maison jamais terminée qu'il a fallu rénover, et une aile y a été ajoutée pour faire des chambres. C'est l'évêque du diocèse qui a mis la maison à la disposition de Marie-Suzanne.

Par ailleurs,un partenariat a été établi avec le diocèse, qui gère administrativement ce projet à des conditions définies dans un document signé par les deux parties.
La maison d'accueil est en voie d'achèvement (photo du 11 novembre 2010 ).

Il ne reste plus à Marie-Suzanne qu'à trouver des pensionnaires!...
Catholiques pratiquants si possible, mais il n'y a pas d'exclusive.
Le plus important est d'apporter une compétence.
Si cela vous tente...

Le problème du financement:

Jusqu'ici Marie-Suzanne a fait face aux frais de construction et d'aménagement de la maison avec ses économies et grâce à un emprunt qui « mange » 1000 euros de sa retraite de prof par mois...En raison d'imprévus dans les travaux, le devis de départ a été largement dépassé. « L'argent que j'avais pour de petits projets de développement est parti dans la construction » se désole-t-elle. « Je n'ai plus rien! ».Elle avoue même en avoir été réduite à se nourrir uniquement de riz et de sauce tomate!

Autre problème: le bénévolat total de la part des Congolais est difficile à obtenir, étant donné leur niveau de vie: « On travaille bénévolement avec toi, et tu ne nous offres même pas un « sucré » ou une bière » s'est-elle entendu dire...Réaliste, Marie-Suzanne pense qu'il faudrait  leur donner une petite rémunération d'au moins 30 dollars par mois pour les motiver davantage. Mais où trouver l'argent pour tout cela?

L'idée d'une association:

Marie-Suzanne en vient à songer à présent à un projet d'association, semblable à celle qui existait pour le Mali dans le dernier lycée, à Châtenay-Malabry, où elle enseignait, et qui pourrait être une source de financement tout en stimulant par son existence le fonctionnement des projets sur place.L'existence d'une association donnera davantage confiance aux locaux pour travailler avec elle, pense-t-elle.

De plus, elle ne peut porter seule une telle entreprise.

Ou plutôt ,elle pense à un projet de double association, l'une à Kisantu, l'autre en France.

Pour l'instant à Kisantu, elle n'a pas trouvé les « têtes fortes » qui pourraient travailler avec elle malgré de nombreux contacts pris, par exemple des ingénieurs agronomes ; ils sont souvent absorbés par d'autres projets, plus vastes, et bien plus coûteux, dans des régions rurales plus éloignées.

En France, elle commence à prendre des contacts...

Appel à participation:

Si ce projet, déjà bien engagé, vous semble devoir être encouragé et soutenu, qu'il s'agisse d'adhérer à l'association projetée ou de s'engager sur place, prenez contact avec Marie-Suzanne.

Pour la contacter:
Son email: beauregardsuzanne@yahoo.fr.

Tél:00 243 998 330 791 / 00 33 1 46 83 19 68

Ou écrire à Marie-Suzanne Beauregard, Kubama Kisantu, avenue de la Reine,141 - B1030 Bruxelles.

Si vous avez des connaissances de l'Afrique et/ou de ce type de dispositif d'aide, n'hésitez pas à lui apporter aussi vos conseils!

Reportage: JMSATTO

La Blogazette des Ulis: http://www.jmsattoblogazettedesulis.blogspot.com/.


Document complémentaire: les besoins des habitants de Kisantu d'après Marie-Suzanne:

L’aspect plus négatif qui doit être amélioré : même avec des réussites dans les domaines sanitaire et éducatif , la population vit pauvrement : essentiellement de l’agriculture manuelle à la houe dans des champs éloignés jusqu’à 12 kms – culture du manioc, de l’arachide, du maïs, du haricot, cultures maraîchères à la saison sèche, …- des fruits donnés par une nature luxuriante grâce aux pluies tropicales – mangues, papayes, mangoustans, …- du petit élevage :- chèvres, moutons et poules en divagation, quelques porcs- , très peu de la pêche, du petit commerce, souvent informel et des services publics- il y a ici beaucoup de fonctionnaires dans l’administration civile et militaire, la santé, l’éducation, mal payés et qui, en dehors de leur métier, travaillent aux champs et dans le commerce. L’artisanat est important dans le bâtiment, la menuiserie, l’électricité, la boulangerie, la couture, … avec un outillage de qualité inégale, mais les artisans ne sont pas organisés entre eux. Il n’y a aucune industrie de transformation, en particulier dans l’agro-alimentaire. Une fabrique de sacs pour les deux cimenteries du Bas-Congo situées dans le diocèse de Matadi vient de rouvrir ses portes, après plusieurs années de fermeture,…. Le Diocèse possède un petit garage, une menuiserie et une petite imprimerie qui seraient à remettre en état. Au plan de l’urbanisme, l’habitat est dans l’ensemble fort sommaire et insalubre, sans installations sanitaires ni fosses septiques. On manque de logement pour les étudiants. Il y a quelques petites boutiques, pas de magasins, pas d’organisation du tri des ordures et déchets, pas de vie culturelle, artistique et de loisirs, sauf les spectacles scolaires où l’on découvre des élèves très doués pour le théâtre et la poésie….. MSB

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